08/03/2016 : L'homme dans l'évolution



Parmi nous, il y en a qui, aujourd’hui, par légers effleurements de leurs doigts sur un écran tactile, interagissent avec le monde entier alors que, tout jeunes, c’est en charrette à cheval qu’ils se rendaient au bourg du village pour le marché hebdomadaire.

C’était il y a seulement quelques décennies, et pourtant nous vivions alors dans un tout autre monde que le monde actuel, au point que nous n’en finirions pas de décliner les contrastes entre ces deux mondes. Mais il n’y a eu ni tremblement de terre, ni impact d’une météorite, ni tout autre cataclysme, pour rendre compte d’un tel bouleversement de nos existences. C’est donc bien d’« évolution » dont il s’agit.

Or, nous savons que l’ensemble des espèces vivantes –  et donc l’espèce humaine – sont « prises » dans les processus d’évolution selon certaines lois qui ont été progressivement mises à jour par les scientifiques (en particulier Darwin) depuis le XIXème siècle.

Ces lois sont des lois d’adaptation du vivant à un environnement inédit par modifications de caractères communs aux individus, modifications qui s’inscrivent dans leur patrimoine génétique.
Sommes-nous ainsi modifiés depuis une soixantaine d’années, ou sommes-nous en voie de l’être ?
Mais la question ne prend toute son ampleur que si nous remarquons que c’est nous, humains, qui sommes, par nos choix de comportement, le principal facteur de cette évolution accélérée de notre environnement. Cela semble signifier que nous ne sommes pas simplement déterminés, comme les autres espèces, par les contraintes de notre environnement et les mécanismes d’adaptation qui y répondent.

Ne faut-il pas alors penser l’évolution de l’espèce humaine au-delà des lois qui ont été dégagées pour l’ensemble du monde vivant ? N’y a-t-il pas à prendre en compte, dans la pensée de notre évolution, les prodigieux progrès techniques par lesquels nous transformons la planète ? 

Mais une composante récente du progrès technique est la capacité de modifier, presque aussi aisément qu’un texte dans un traitement de texte, le génome d’un individu vivant. Cela signifie que l’évolution du vivant relève aussi, désormais, des choix des hommes, lesquels sont tributaires des institutions auxquelles ils participent et, finalement, de l’état de la culture à laquelle ils appartiennent.
N’allons-nous pas vers une crise des théories de l’évolution qui deviendront impuissantes à comprendre et à prévoir si elles ne prennent pas en compte le problème de l’évolution culturelle des hommes ?

Pierre Jean DESSERTINE, philosophe